Alors que ses voisins sahéliens et soudanais souffrent de troubles sécuritaires, le Tchad tente de changer son image de haut lieu du trafic d’or et d’ouvrir grand la porte aux investisseurs. C’est ce qui a motivé la décision de la fermeture le jeudi 8 octobre 2020 de tous les sites d’orpaillage illégal sur l’ensemble du territoire national, de l’annulation sous toutes leurs formes, de tous les titres miniers, permis de recherche, et/ou d’exploitation industrielle, semi-industrielle et artisanale de l’or.
Le 6 août 2020, moins d’une semaine après la réouverture effective de l’espace aérien tchadien après des mois de fermeture due au Covid-19, une équipe a été installée par les autorités du pays à l’aéroport international Hassan-Djamous de N’Djaména avec pour mandat spécifique de contrôler les exportations d’or et de métaux précieux. Ces derniers étant principalement extraits à échelle artisanale ou semi- mécanisée au Tchad, les évacuations clandestines sont nombreuses. La mission d’inspection des évacuations de minerais à l’aéroport de N’Djamena est dévolue au Comptoir national de l’or et des métaux précieux (CNOMP) depuis sa création en mai 2019, mais elle vient seulement d’être concrétisée.
Riche en or, le Tchad pourrait bénéficier de l’envolée de son prix ces dernières semaines – le métal jaune a battu un record historique début août en dépassant le seuil symbolique de 2 000 dollars l’once -, d’autant plus que l’exploitation à échelle artisanale permet souvent un démarrage rapide des opérations. Par ailleurs, les pays proches du Tchad disposant de larges ressources en or, le Soudan à l’est, les sahéliens Niger, Mali et Burkina Faso à l’ouest, sont en proie à des troubles sociaux et à l’insécurité causée par les groupes djihadistes.
Une vertu qui pourrait vite se montrer payante
Le durcissement des contrôles de la légalité des activités minières au Tchad peut aider à convaincre des investisseurs étrangers de s’intéresser aux opportunités dans le pays, qui apparaît plus sûr mais pâtit encore de son image de hub du trafic clandestin d’or, notamment dans la zone instable du nord. Déjà, le 30 juin, l’Etat avait publié in extremis son rapport 2017 pour l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE). Cet organisme de transparence financière dans les mines et le pétrole avait menacé de suspendre N’Djaména de sa participation si le document n’était pas présenté fin juin.
Initiative payante ? Depuis quelques jours, les dirigeants de la compagnie d’Etat, Société Nationale des Mines et de la Géologie (SONAMIG) voient débarquer une noria d’entreprises et d’investisseurs dans leurs bureaux. Des accords ont été conclus pour l’exploration et l’exploitation d’or avec des étrangers dès la réouverture de l’espace aérien, notamment avec la société enregistrée à Londres Coutts Mining. Le DG de la Sonamig, Outhman Abderahmane Hamdane, avait par ailleurs recommencé à recevoir des entreprises locales dès la fin juillet, peu après la nomination à la présidence du conseil d’administration de la société nationale de l’ex-ministre du pétrole et des mines récemment remercié Mahamat Hamid Koua.